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Kant et la liberté

Publié le 6 juin 2018

Qu’est-ce que la liberté ? En voilà une question qui en a taraudé plus d’un ! Des écrivains aux artistes, des philosophes au plus « commun des mortels », la question de la liberté est une question humaine qui nous touche tous, d’une manière ou d’une autre, et quel que soit le stade de notre vie. Elle est impliquée dans des choix, personnels ou politiques, comme changer d’orientation professionnelle ou voter lors des élections. Dans nos sociétés modernes, elle s’est même infiltrée dans notre pensée et notre parole en tant que liberté d’opinion et d’expression. Mais quelle liberté avons-nous vraiment, et comment la définit-on ? La liberté est-elle une réalité, ou simplement une illusion que l’être humain se donne pour conférer un sens à son existence ?

 

La critique de la raison pratique

 

Emmanuel Kant est une des grandes figures de la philosophie occidentale. Sans surprise, donc, et comme beaucoup d’autres, il s’est penché sur la question de la liberté dans une de ses trois grandes Critiques : La critique de la raison pratique. La raison pratique, pour faire simple, c’est le pendant de la raison qui traite des questions d’ordre moral : la célèbre question du mensonge (selon Kant, nous ne pouvons simplement pas mentir) est une question à laquelle répond cette facette de notre raison.

 

La liberté : première ou seconde ?

 

De manière générale, les hommes et les femmes attribuent souvent la liberté à la conception qu’ils se font de leur vie : ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas, leurs objectifs professionnels, leur choix de partenaire, etc. Avant, le cadre était plus rigide : les philosophes cherchaient un sens ultime à la vie humaine, à laquelle une théorie de la liberté pouvait se subordonner. Ce sens, on l'appelle la conception de la vie bonne.

 

Concrètement, dans cette conception, la liberté est secondaire parce qu’elle est mobilisée pour atteindre un but. Aujourd’hui, ce but est plus individualiste, mais il peut également être politique ou religieux. En ce sens, on parle d’une liberté téléologique : mot qui vient du grec telos, « but ».

Kant estime qu’en réalité, on ne pourra jamais s’accorder sur ce qui constitue la vie bonne, et, pour en revenir à notre question de départ, qu’on ne peut pas non plus prouver que l’homme est libre. Pour lui, cela a deux conséquences : premièrement, pour penser la liberté en tant que principe, il faut se débarrasser du sens que les gens donnent à leur vie. La liberté n’est alors plus téléologique mais déontologique : elle implique un devoir qui, contrairement au but à atteindre, peut s’appliquer à tous les êtres humains de façon égale.

Deuxièmement, si on ne peut pas prouver que l’homme est libre, il s’agit tout de même d’établir une morale qui puisse valoir pour tous. Or, cette morale implique des actes réfléchis de la part des personnes, et suppose qu’ils sont libres de poser cet acte ou un autre. Cette supposition a elle-même deux conséquences très importantes : d’abord, que la morale kantienne repose sur l’existence de la liberté ; liberté axiologique, c’est-à-dire qu’on la présuppose faute d’être en mesure de la prouver. Ensuite, que la liberté constitue le fondement de ce que l’on appelle les régimes de responsabilité, qu’elle soit juridique, politique, civique, économique ou même écologique. C’est-à-dire que sans liberté, il n’y a pas de responsabilité par rapport à un acte qu’on aurait posé.

 

Qu’est-ce que cela implique pour la morale ?

 

La morale kantienne, en ce sens, se fonde sur un principe très basique : la loi morale, qui fait appel à tous les hommes. Ce qu’elle impose est simple : « sois libre ». Une autre manière, plus vulgaire, de dire la loi morale serait : « sois libre et pose un choix ». Cela veut dire que l’homme est inconditionnellement appelé à agir, et que tout acte qu’il pose implique inévitablement sa responsabilité. Il est, entièrement, la cause de son acte.

 

Cet appel à agir librement s’accompagne de situations particulières qui compliquent encore plus la décision à poser. C’est là qu’intervient le principe d’action : c’est le principe selon lequel on dirige notre acte. « Je fais ceci parce que cela ». Ce principe doit être universel : c’est-à-dire qu’il doit potentiellement pouvoir s’appliquer à toute situation similaire. Et ceci, indépendamment de tout sentimentalisme ! La règle d’or (« ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas que l’on vous fasse ») ne s’applique pas du tout à la morale de Kant !

 

En effet, personne n’aurait envie qu’on l’envoie en prison, mais tout le monde peut s’accorder qu’un crime reste moralement punissable…

 

 

 

Qu'en pensez-vous? La liberté est-elle un devoir, un droit, un moyen ou un leurre?

Mathilde Wynsdau

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